Tout savoir sur le changement d’année de base des comptes nationaux

L’ANSD vient de mettre en place une nouvelle année de base des comptes nationaux du Sénégal dans le cadre Projet de rénovation des comptes nationaux (PRCN). La nouvelle année de base 2014, qui remplace celle de 1999, est établie en conformité avec le dernier manuel sur les comptes nationaux adopté par les Nations-Unies (SCN 2008). Outre les changements d’ordre conceptuels, la nouvelle base intègre des changements méthodologiques ainsi que de nouvelles sources de données permettant d’améliorer la couverture du PIB et de mettre à jour les données sur la structure de l’économie. Les différents changements apportés ont induit une révision de 29,4% du PIB de 2014.

Cette note destinée à la presse décrit, de façon sommaire, les principales motivations de la refonte des comptes nationaux, la démarche qui a été adoptée, les différents changements apportés et donne quelques résultats saillants.

  1. Pourquoi un changement d’année de base des comptes nationaux ?

Les comptes nationaux constituent une composante essentielle du système national d’information statistique. Ils sont élaborés en référence au Système de comptabilité nationale (SCN), adopté par la Commission statistique des Nations Unies, qui fixe les concepts et définitions, les nomenclatures, les modes de valorisation ainsi que les différents comptes à produire.

Les comptes nationaux fournissent une description synthétique et cohérente de l’économie. Ils permettent, en particulier, de déterminer le Produit intérieur brut (PIB) et de disposer d’indicateurs d’évolution pour mesurer les performances de l’économie nationale dans le temps.

Les comptes nationaux sont établis, à partir d’une année de base, qui constitue en général l’année de référence des agrégats macroéconomiques. Cependant, au fur et à mesure que l’année de base vieillie, la qualité des comptes se dégrade. Il devient, ainsi, impératif de la renouveler pour mieux appréhender les changements affectant les structures de l’économie. En général, plusieurs raisons incitent au changement de l’année de base des comptes nationaux :

  • la première raison est d’ordre conceptuel ou méthodologique. Il s’agit de prendre en compte les nouveautés du dernier Système de comptabilité nationale adopté par les Nations-Unies (le SCN 2008) ainsi que les nouvelles classifications nationales et internationales des activités et des produits, impliquant la reconstitution d’une série de comptes différente de l’ancienne ;
  • la deuxième raison est l’évolution structurelle de l’activité économique, due à l’apparition de nouvelles activités et de nouveaux produits ou à la disparition d’autres, au changement dans les habitudes de consommation, de production et de commercialisation et à la modification sensible de la qualité des produits ;
  • la troisième motivation est le souci d’améliorer la qualité des comptes nationaux, dégradée par l’éloignement de l’année de base. En effet, les erreurs sur les évolutions annuelles peuvent se cumuler et les choix méthodologiques ou les arbitrages opérés sur l’année de base peuvent se révéler inappropriés et moins pertinents pour les années courantes, contribuant à altérer la série des comptes.

Ainsi, le changement de l’année de base des comptes nationaux du Sénégal s’inscrit dans la volonté du pays de suivre la dynamique enclenchée au niveau continental pour la mise en œuvre du SCN 2008, à l’instar de pays comme l’Afrique du Sud, le Cameroun, le Ghana, le Kenya, le Maroc et le Nigéria. Aussi, le passage à une nouvelle année de base permet-il de renforcer la qualité des comptes nationaux, notamment avec l’amélioration de la couverture et l’actualisation de la structure de l’économie.

  1. Mise en œuvre du Projet

Le Projet de changement d’année de base des comptes nationaux du Sénégal a été institué par l’arrêté n°12877 du 22 juin 2015 du Ministre de l’économie, des finances et du plan (MEFP). Ainsi, il a été mis en place un Comité de pilotage constitué par les Directeurs généraux (ou leurs représentants) du MEFP, de l’APIX et de l’ADEPME, de la Direction nationale de la BCEAO pour le Sénégal, de membres du Système statistique national (SSN), de représentants du patronat, des instituts de recherche en économie et des partenaires techniques et financiers.

La mise en œuvre des activités du Projet de rénovation des comptes nationaux a été confiée à une Unité de gestion coordonnée par le Directeur des statistiques économiques et de la comptabilité nationale de l’ANSD. Les travaux se sont déroulés sur une période de près de deux ans et ont mobilisé une trentaine de cadres économistes/statisticiens. L’année 2014 a été retenue comme nouvelle base des comptes nationaux et doit remplacer la base 1999.

Le Projet a bénéficié de l’assistance technique de la Commission Economique des Nations-Unies pour l’Afrique (CEA), de l’Observatoire Economique et Statistique d’Afrique subsaharienne (AFRISTAT) et du Fonds Monétaire International (FMI) ainsi que d’un soutien financier de la Délégation de l’Union Européenne au Sénégal.

  1. Principaux changements introduits dans la base 2014

Les principaux changements introduits dans la nouvelle base des comptes nationaux portent sur :

3.1 L’utilisation de nouvelles sources d’informations

Il s’agit principalement :

  • du Recensement Général des Entreprises (RGE) qui inclue une enquête sur la structure des coûts de production ;
  • de l’Enquête nationale sur l’Emploi au Sénégal (ENES 2015)
  • de l’Enquête « Listening to Senegal » (L2S) qui fournit notamment des données sur la consommation des ménages par produit, pour l’année 2014 ;
  • de l’Enquête nationale auprès des Unités de production informelle au Sénégal (ENUPIS) réalisée en 2016 ;
  • des enquêtes agricoles menées régulièrement par la Direction de l’Analyse, de la Prévision et des Statistiques Agricoles (DAPSA) du Ministère chargé de l’Agriculture;
  • des enquêtes réalisées dans le cadre de l’élaboration des comptes satellites de la pêche au Sénégal en 2015 ;
  • de différentes sources de données administratives (Balance des paiements, statistiques des finances publiques, statistiques douanières, débarquements des pêches artisanales et industrielles ; production contrôlée de produits forestiers ; effectifs du cheptel, statistiques sur la production minière, les documents comptables des entreprises, etc.).
  • La prise en compte de certaines nouveautés du SCN 2008

L’ANSD a mis à profit le changement d’année de base des comptes nationaux pour introduire certaines recommandations du SCN 2008 pertinentes pour l’économie Sénégalaise. Il s’agit notamment de la prise en compte :

  • des dépenses consacrées à la Recherche & Développement comme des investissements et non plus comme des consommations intermédiaires, ce qui conduit à relever le niveau du PIB ;
  • du nouveau mode de calcul et de la répartition du service d’intermédiation financière indirectement mesuré (SIFIM) selon le bénéficiaire (en consommation intermédiaire, consommation finale ou exportation) ;
  • du mode de calcul de la production de la Banque centrale et de l’assurance non vie.
  • L’adoption d’une nouvelle classification des activités et des produits

Pour prendre en compte les mutations intervenues dans la structure de l’économie et les besoins d’informations des utilisateurs ainsi que la révision des nomenclatures en vigueur dans les pays membres d’Afristat, des modifications ont été apportées aux nomenclatures permettant de classer les activités et les produits. A titre illustratif, toutes les activités liées aux technologies de l’information et de la communication ont été regroupées dans une branche appelée «Information et communication». Auparavant, elles étaient dispersées dans plusieurs branches, ne permettant pas d’en avoir une bonne visibilité.

  • Résultats obtenus

Au terme des travaux, le Produit intérieur brut (PIB) est ressorti à 9 775 milliards FCFA, en hausse de 29,4%, comparativement à son niveau de 2014 évalué selon l’ancienne base 1999. Cette hausse assez substantielle résulte essentiellement d’une amélioration de la couverture de l’activité économique, notamment avec la réalisation du Recensement général des entreprises (RGE), la meilleure prise en compte des activités comme l’exploration minière, la pêche continentale et l’aquaculture, l’hydraulique rurale et la mise en œuvre des changements introduits par le SCN2008.

Nonobstant le niveau des échanges extérieurs, tous les agrégats ont connu des révisions à la hausse. A cet égard, la consommation finale et l’investissement ont augmenté respectivement de 21,5% et 18,9%, par rapport à la base 99. 

En termes de structure par secteur, le poids du tertiaire a enregistré une augmentation passant de 52,7% à 54,0%, comparativement aux résultats des comptes nationaux de 2014 base 1999. La prépondérance de ce secteur est notamment renforcée par la prise en compte des produits de la recherche & développement (R&D) dans le tertiaire. En revanche, les poids des activités du primaire et celui du secondaire sont restés quasiment stables.


Par ailleurs, le poids des taxes s’est replié en s’établissant à 9,9% du PIB contre 12,8% dans l’ancienne base, sous l’effet d’une réévaluation plus importante du PIB.En termes de structure par secteur, le poids du tertiaire a enregistré une augmentation passant de 52,7% à 54,0%, comparativement aux résultats des comptes nationaux de 2014 base 1999. La prépondérance de ce secteur est notamment renforcée par la prise en compte des produits de la recherche & développement (R&D) dans le tertiaire. En revanche, les poids des activités du primaire et celui du secondaire sont restés quasiment stables.

En outre, le changement d’année de base a permis d’avoir une nouvelle structure de l’économie. En effet, les intrants qui entrent dans le processus de production sont actualisés pour toutes les branches d’activités. En conséquence, des produits comme l’électricité et les services de télécommunication gagnent de l’ampleur dans les charges des unités de production.

  • Quelques conséquences du changement d’année de base

Le suivi de la performance des pays s’appuie essentiellement sur l’analyse d’indicateurs spécifiques tels que le PIB par tête, le déficit budgétaire global, la pression fiscale, le taux d’ouverture, le taux d’endettement. Tous ces indicateurs sont définis par rapport au PIB.

Ainsi, une modification du niveau du PIB a un impact direct sur le niveau de ces indicateurs. A cet effet, le relèvement du PIB améliore le classement du Sénégal sur les critères de convergence de l’UEMOA concernant le déficit budgétaire fixé à 3% du PIB. Par contre, elle dégrade ses performances selon l’indicateur sur la pression fiscale. En définitive, le changement d’année de base permettra d’avoir une bonne référence pour l’évaluation des politiques économiques mises en œuvre par le Gouvernement.


Le SIFIM est un service fourni par les intermédiaires financiers à savoir les banques et autres établissements de crédit. Il est évalué comme la marge que les intermédiaires financiers tirent de leurs relations avec leur clientèle sur leurs dépôts et leurs crédits. Ces intermédiaires financiers prêtent à leurs clients au-dessus du taux de référence auquel ils se refinancent et rémunèrent leurs dépôts à un taux inférieur.Le SCN 2008 remplace le SCN 93 qui était le précédent manuel de référence en matière d’élaboration des comptes nationaux.

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.