Souleymane Teliko tel quel

Lors de l’Ag de l’Ums ce week-end à Mbour, Souleymane Teliko n’a pas mâché ses mots pour décrire les maux qui gangrènent le système judiciaire.

Le discours du président de l’Union des magistrats du Sénégal (Ums) ne change pas. Souleymane Teliko n’a pas mis de gants ce samedi lors de l’Assemblée générale ordinaire des magistrats à Saly pour évoquer l’indépendance de la justice, les conditions de travail des magistrats, leur carrière et les réformes de la justice.Juge Souleymane Téliko

Le ministre de la Justice écoute religieusement l’ex-Secrétaire général de la Cour d’appel de Dakar, qui rappelle que depuis son élection à la tête de l’Ums son objectif était de faire de telle sorte qu’elle reste fidèle à sa vocation «qui est d’être une force de propositions dans l’intérêt des magistrats et de la justice». Il dit : «Nous estimons que le magistrat ne doit pas seulement se contenter d’aller aux audiences, de rédiger des jugements ou des arrêts, il doit participer à l’œuvre de construction par la réflexion en participant aux débats en cours sur la justice. On ne peut pas laisser le débat sur la justice entre les mains d’avocats, de journalistes ou d’autres personnes. Les magistrats sont les acteurs clés du système judiciaire donc ils doivent participer à ce titre à tout ce qui a trait au fonctionnement de la justice.»

D’où l’organisation, à l’en croire, d’un colloque au niveau des ressorts des différentes Cours d’appel pour inciter les magistrats à donner leurs points de vue sur le fonctionnement de la justice. «Ce qui a abouti aux propositions de réforme que l’Ums a transmises à l’autorité», dit-il. Mais, le juge Teliko a du mal à s’accommoder du mutisme du Garde des sceaux, qui a les «propositions» sur sa table. «Nous avons transmis des propositions de réforme et on attend des autorités qu’elles donnent une suite favorable à ces propositions, ce qui n’est pas encore le cas et à notre avis cet immobilisme-là ne se justifie pas.

Avant ces propositions, l’autorité pouvait se dire qu’il n’y a pas encore de propositions claires concrètes, mais à présent que tous les acteurs sont réunis, je veux parler des magistrats, des avocats, des huissiers, les réflexions ont fait l’objet de propositions concrètes transmises à l’autorité. Je pense que si les autorités veulent réformer la justice dans un sens positif, elles doivent tenir compte de ces propositions-là et passer aux actes», avance Souleymane Teliko.

Il s’agit des questions brûlantes de l’heure telle la question de l’indépendance de la justice, plus particulièrement de la composition du Conseil supérieur de la magistrature et le respect de l‘inamovibilité des juges. «Quand on est acteur dans un domaine précis que ce soit la justice ou ailleurs, on peut revendiquer des droits, on doit également accepter d’assumer la responsabilité. Si les gens critiquent la justice, c’est vrai qu’il y a une part d’exagération mais il y a aussi une part de vérité. Et c’est cette part de vérité-là, il faut qu’on l’assume. Si ce sont des magistrats, qui font des déclarations politiques, de soutien au régime en violation du statut, ce n’est pas de nature à donner une bonne image de la justice. Il faudrait aussi qu’on l’accepte et qu’on se dise la vérité», martèle Souleymane Teliko.

Il ne se voile pas la face et ne passe pas par quatre chemins pour parler des problèmes qui gangrènent leur profession. «Il y a des problèmes réels qui existent aujourd’hui, quand le ministre dit que ce débat aurait pu être prononcé en 2008 pour dire que ce n’est pas un débat, ce n’est pas parce que ces problèmes ont duré qu’on ne doit pas les régler, il y a des problèmes qui existent, il faut accepter de les résoudre», insiste le président de l’Ums.

«L‘Ums condamne de manière ferme toutes ces attaques personnelles»

Par ailleurs, il n’a pas manqué d’évoquer l’affaire Cheikh Bamba Dièye convoqué à la Dic pour des propos jugés malsains tenus à l’endroit de magistrats. «L‘Ums ne peut pas se constituer partie civile pour le compte d’un membre qui a été personnellement visé. Par contre, l’Ums condamne de manière ferme toutes ces attaques personnelles qui ne se justifient pas. Quand vous n’êtes pas d’accord sur une décision de justice, vous devez exercer les voies de recours que la loi vous donne mais vous ne devez pas vous en prendre personnellement à des magistrats et si on laisse ça, c’est la porte ouverte à l’anarchie. L’Ums est la première à considérer qu’il y a des problèmes, mais quand il y a des problèmes, on doit les régler par la réflexion en s’asseyant autour d’une table pour voir quelles sont les solutions structurelles qu’il faut. C’est cette attitude de responsabilité-là qu’il faut mais pas par des attaques surtout que quand cela provient d’une personne qui aspire à diriger un pays», regrette M. Teliko.

LeQuotidien

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