Ndèye Nogaye Babel Sow, une figure de résistance féminine redoutable

Ndèye Nogaye Babel Sow est une figure de résistance féminine redoutable à suivre. A 20 ans, elle s’est fait une remarquable place au sein du front-anti CFA/APE. Une vraie place et non décor !

“Tout poète pertinent commence par la révolte’’. Cette affirmation de Jean Baptiste Tati Loutard, appliquée à notre modèle, devient : “Tout engagement réel commence par la révolte.’’ Sur son profil WhatsApp, Ndèye Nogaye Babel Sow proclame : “Nous avons choisi d’être au front par devoir et honneur.’’ Ce slogan péremptoire renseigne largement sur la personnalité de cette native de Bambilor (Rufisque) qui se définit comme une panafricaniste et non une activiste.

Ceux qui ont suivi le feuilleton sur le F CFA,tout au long de l’année écoulée, n’auront pas de mal à reconnaître le visage de cette jeune femme engagée, au premier rang de tous les fronts, de toutes les luttes. Dans un milieu éminemment masculin, Ndèye s’est fait une place. Une place qu’elle doit moins à son statut de femme qu’à ses compétences intellectuelles avé- rées au sein du groupe, notamment pour aptitudes oratoires. D’où sa désignation comme porte-parole international du Mouvement Urgence panafricaniste que dirige son collègue Kémi Séba.

Même si, reconnaît-elle, son affirmation dans ce front n’a pas été une sinécure, “dans une société phallocrate, misogyne’’. Poursuivant, la lauréate du premier prix national de poésie “Les vers au féminin’’ rappelle ses convictions qui justifient sa présence dans le front anti-CFA/APE : “Je suis amoureuse de l’Afrique. Mon amour pour notre continent est un peu similaire à l’engagement d’une mère de famille à sauver ses enfants. Contrairement à ce que certains pensent, je ne suis pas là pour amuser la galerie ou pour le décor. Je me définis comme un acteur à part entière.’’

Née le 10 janvier 1997, Ndèye Babel Sow a fait de la lutte contre le F CFA, une affaire personnelle. “Le combat contre le F CFA est un combat générationnel, la continuité de celui commencé par nos ancêtres pour la liberté, la souveraineté et la fin de l’impérialisme. C’est un combat qui est dans nos gènes, dans notre sang et que nous ne pouvons pas ne pas mener.

Dans un contexte international et géopolitique marqué par la mondialisation, ce combat est urgent’’, explique l’étudiante en licence 3, en administration publique et en Master 1 en droit privé. A ceux qui reprochent les détracteurs du CFA de manquer de stratégies et de propositions alternatives, elle répond : “Avant de poser le débat sur la place publique, nous avons étudié la question du F CFA en profondeur, techniquement et politiquement. Mais ce serait trop facile de dire qu’à la place du F CFA, nous voulons des cauris. Ce que nous voulons, c’est une monnaie souveraine.

C’est-à-dire l’équivalent du F CFA dans une Banque centrale africaine où la France n’aura pas son nez et son véto. Avec cette monnaie-là, ce ne serait pas possible de dévaluer notre monnaie quand on veut et comme on le veut’’, croit-elle.

A propos du 8 mars, la lauréate du premier prix du Centenaire d’Aimé Césaire (2012) précise que la société africaine précoloniale était essentiellement matriarcale où les femmes et les hommes étaient complémentaires. Ce n’est qu’avec la colonisa- tion que les droits de la femme ont été privés. Sinon, en Afrique, on a toujours donné à la femme la place qui était la sienne. Par ailleurs, le combat sur la parité, Ndèye Babel Sow, nouvellement élue “cham- pionne d’Afrique de leadership et de solution (Conakry 2017)’’, trouve que ce n’est pas le sien. Toutefois, elle soutient que le fait de nier la légitimité et la pertinence du féminisme, c’est nier les violences faites aux femmes et le non-accès des femmes à la terre.

Si Ndèye Nogaye pense que la parité n’est pas un combat qui vaut la peine d’être menée, elle considère cependant l’excision comme un phénomène contre lequel toutes les femmes devraient se dresser. De retour de Guinée, il y a 48 heures, où elle était avec Kémy Séba, elle y a animé beaucoup de conférences sur la mal gouvernance et les enjeux et défis qui interpellent la jeunesse africaine de Guinée. Ses rencontres avec les jeunes du continent, décrit-elle, sont teintées d’émotions et d’espoir. Par la parole, l’écriture et des actes “concrets’’, Ndèye Babel Sow combat ce qu’elle appelle “l’impérialisme’’. Le livre qu’elle a coécrit avec un compagnon de lutte du Mali, “Mots contre mots’’ qui retrace le débat sur le F CFA, sortira bientôt.


MAMADOU YAYA BALDÉ – EnQuete N°2010

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