Me Assane Dioma Ndiaye, président de la Lsdh : «La justice sénégalaise n’est plus citée en exemple en Afrique»

«La société civile a exploré depuis longtemps le chantier de l’indépendance de la justice. Et aujourd’hui, les acteurs conviennent qu’ils ne peuvent plus faire l’économie de cette introspection. Vous avez entendu les différents discours, notamment celui de Téliko (président de l’Ums) qui exprime le désarroi des magistrats face à une opinion publique qui ne comprend plus une justice qui est supposée rendue à son nom. Le souhait de la société civile est que les propositions qui sortiront de ce colloque fassent avancer la justice qui est l’épine dorsale de notre Etat de droit. Aujourd’hui, tout le monde peut convenir que s’il y a un maillon dans l’architecture démocratique qui ne joue pas son rôle, c’est le pouvoir judiciaire. Nous espérons que cette génération de jeunes magistrats, encadrés par les anciens, va faire bloc. L’autorité ne doit pas voir en cette initiative une défiance. Il est important que tous les magistrats fassent corps. Il y va de la survie de notre démocratie, car le plus grand danger qui guette la justice c’est l’instrumentalisation. Nous avons entendu des discours rassurants de ministre de la Justice, mais dans la pratique tout le monde se rend compte que les magistrats sont harcelés. Un magistrat qui rend une décision qui ne va pas dans le sens voulu par l’Exécutif est sous le coup d’une affectation potentielle et on viole le principe de l’inamovibilité du juge. Nous allons faire des propositions écrites, notamment l’interdiction des instructions écrites par l’Exécutif dans le cadre des affaires individuelles. Nous allons demander également que la carrière des magistrats soit gérée par les hauts magistrats. Je crois que les autorités ont le choix entre être sous les critiques acerbes de la part des populations ou rejetées par cette population au nom de laquelle cette justice est rendue ou bien avoir une justice forte indépendante au-dessus de toute ingérence. C’est vrai que la justice sénégalaise était citée en exemple, mais aujourd’hui ce n’est plus le cas, contrairement aux propos du ministre. De l’extérieur, les gens s’étonnent quand on entend des juridictions spéciales comme la Crei, des procédures visant des hommes politiques et la manière dont certains parlementaires sont poursuivis sans respecter l’immunité parlementaire. Evidemment, les Africains ne peuvent plus nous prendre comme des modèles.» ndieng@lequotidien.sn

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