Matam : Six (6) milliards pour renforcer la sécurité alimentaire et nutritionnelle

Le commissaire européen au développement, M. Neven Mimika a procédé mercredi dernier à la signature de conventions de financement de deux projets à hauteur de 6 milliards de francs CFA qui entrent dans le cadre du «Fonds fiduciaire d’urgence en faveur de la stabilité et de la lutte contre les causes profondes de la migration irrégulière et du phénomène des personnes déplacées en Afrique».Le commissaire européen au développement, Neven Mimika

Le commissaire européen au développement, M. Neven Mimika a procédé mercredi dernier devant M. Birima Mangara, le ministre délé- gué chargé du budget à la signature de conventions de financement de deux projets de grande envergure qui seront mis en œuvre respectivement dans les départements de Kanel, Matam, Ranérou et Podor. Les travaux qui ont recueilli la participation du secrétaire d’Etat espagnol pour la coopération internationale, M. Jesùs Gracia représentant l’AECID et celle de  M. Fréderic Linardon représentant l’ONG ACTED, se sont déroulés en présence de l’ambassadeur de l’Union Européenne au Sénégal, M. Joaquin Gonzà- lez-Ducay et l’ambassadeur  d’Espagne,  M. Alberto Virella. C’est à l’issu des discours d’usage que le commissaire européen au développement a procédé à la signature de conventions de financement des deux projets devant  les autorités administratives de la région, les élus locaux fortement représentés et plusieurs partenaires au développement qui ont fait le déplacement. En premier, la ratification a porté sur la convention d’un programme d’amélioration de la réponse des populations les plus vulnérables face aux crises nutritionnelles et alimentaires avec l’AECID, l’Agence Espagnole de Coopération Internationale pour le Développement. L’autre signature tournera autour d’un projet de renforcement  de la sécurité alimentaire et nutritionnelle avec l’ONG  ACTED.

ACCROISSEMENT DE LA RÉPONSE DES POPULATIONS FACE AUX CRISES NUTRITIONNELLES ET Réduction DE LA MIGRATION IRRÉGULIÈRE

Le projet du programme d’amélioration de la réponse des populations les plus vulnérables face aux crises nutritionnelles et alimentaires d’une enveloppe de 5,2 milliards de francs CFA, sera mis en œuvre par l’AECID, à travers son partenaire local qui se trouve être la Cellule de lutte contre la malnutrition. Il visera à renforcer la sécurité alimentaire et nutritionnelle des populations les plus vulnérables (100 000 personnes bénéficiaires), son  accès aux services sociaux de base, ainsi que la gouvernance des collectivités locales et sa capacité de réponse aux crises. Le projet ACTED d’un montant de 721 millions, a quant à lui pour objectif, d’augmenter l’accès, la disponibilité et la diversité des aliments en milieu rural tout en développant les connaissances et les bonnes pratiques nutritionnelles des populations et des acteurs de la zone d’intervention. Le projet accompagnera ainsi directement 3300 mé- nages (environ 25 000 personnes)  pour la recapitalisation et la pérennisation du capital spécifique à la production vivrière, dont 625 seront également accompagnés pour le renforcement de la production maraîchère de contre saison. En plus, note-t-on, «30 initiatives communautaires à fort impact sur la nutrition au sein des populations, sélectionnées par un comité de pilotage sur la base d’une phase d’identification préliminaire de 6 mois, seront accompagnées vers l’autonomie». Plusieurs mécanismes qui contribueront à régler les difficultés qu’éprouvent les ménages les plus pauvres à supporter leurs besoins alimentaires et à générer des revenus suffisants sur la base de leur activité principale. Il a été prouvé que ce sont justement les difficultés vécues par certains ménages qui sont des facteurs dans l’adoption de l’émigration par leurs membres comme stratégie de sécurisation d’un revenu plus stable. «L’Union européenne (UE) a lancé, à La Valette, la capitale de la République de Malte un ‘’fonds fiduciaire d’urgence», d’un montant de 1,8 milliard d’euros (plus 1000 milliards de FCFA), en faveur de la stabilité et de la lutte contre les causes profondes de la migration irrégulière et du phénomène des personnes déplacées en Afrique. Nous allons nous focaliser sur les besoins des populations vulnérables. Ce que nous venons de signer appartient au programme de la région du Sahel et du bassin du  lac Tchad. Notre objectif est d’atteindre les populations qui sont dans le besoin afin d’augmenter la sécurité alimentaire, de renforcer la nutrition, l’accès à l’eau potable et aussi améliorer les services de santé. Cela devrait permettre aux populations de rester sur place et de trouver des emplois sur place», explique le commissaire européen au développement, M. Neven Mimika. Avant de préciser que l’Union européenne entend bien, à travers l’instrument du fonds fiduciaire renforcer le lien entre ce qui est fait dans le domaine du développement et dans le domaine de la migration. Le secrétaire d’Etat espagnol pour la coopération internationale, M. Jesùs Gracia représentant l’AECID soulignera que «la coopération espagnole travaille avec le Sénégal depuis la signature de l’accord cadre entre les  deux pays, il y a deux ans, dans les secteurs de la bonne gouvernance et dans le secteur de l’agriculture. Deux points qui seront pris en charge par le présent projet, qui ciblera l’agriculture dans un cadre plus grand ainsi que  l’accès à l’eau potable et l’assainissement en faveur des personnes les plus vulnérables». Magnifiant à son tour, les bonnes relations que le Sénégal entretient avec l’Union européenne et le   royaume d’Espagne, Birima Mangara, le ministre délégué chargé du budget, annoncera que les deux projets qui s’intègrent en outre dans le Programme de développement régional intégré de la ré- gion de Matam, s’inscrivent bien à la fois dans la Stratégie nationale de développement économique et social et dans les priorités établies dans la Stratégie nationale de sécurité alimentaire et résilience. «Nous avons constaté ces dernières années un phénomène autour des migrations, les présents projets qui viennent à l’heure, constituent une réponse, parce qu’ils nous permettront de retenir la jeunesse et les femmes qui sont les cibles. Pour plus d’emploi et surtout pour plus d’accès aux services sociaux de base et également pour accompagner la gouvernance locale pour une meilleure prise en charge des besoins de ces populations qui constituent un moyen de lutte contre la pauvreté. Nous avons tous noté la politique qui correspond à la vision du chef de l’Etat déclinée à travers le plan Sé- négal émergeant, une politique de renforcement des structures de notre économie mais une politique qui contribue également par ailleurs à la lutte contre la pauvreté et aux questions d’inégalité.», note t-il.

PODOR, MATAM, KANEL, RANEROU UNE Prévalence QUI DÉPASSE LE SEUIL D’URGENCE DE 15 %

En se fondant sur les enquêtes nutritionnelles réalisées en 2013, les départements de Kanel, Matam, Ranérou et Podor traineraient une prévalence de la malnutrition aigüe avec un seuil d’urgence qui dépasse 15%. Le document de diagnostic explique que «dans ces zones, la forme de malnutrition aigüe sévère affecte entre 2,2 à 4,5 % des enfants de 6 à 59 mois». De même, les dernières enquêtes nationales sur la sécurité alimentaire et la nutrition ont aussi permis d’évaluer l’incidence des maladies diarrhéiques et des IRA chez les enfants de mois de 5 ans ainsi que la prévalence de l’insécurité alimentaire dans ces zones. Les résultats issus des enquêtes de suivi de la pauvreté au Sénégal (ESPSII.2011), plaçaient la région de Matam dans le groupe des régions avec une incidence de la pauvreté de l’ordre de 49,5 %. Une incidence caractérisée forte, corroborée par un taux d’activité de 36,2% (le plus faible du pays), un taux d’alphabétisation tout juste de 28,4 % dont 18,7 % seulement pour les femmes.

  Paradoxalement, malgré les potentialités agricoles que détiennent les départements de Kanel, Podor et Matam qui disposent de plusieurs milliers d’hectares de terres irrigables (un avantage comparatif en termes de disponibilité alimentaire), l’étude notera que , «l’insécurité alimentaire est devenue cyclique dans cette partie du Sénégal». Indiquant même, que le département de Matam connait une prévalence d’insécurité alimentaire très élevée de l’ordre de 70 % (ENSAN 2013).

Dans la région de Matam, même si les récoltes de 2015 ont été satisfaisantes, l’étude notera qu’elles n’ont pas assez été suffisantes pour combler le déficit accumulé lors des dernières années. On renseigne en effet que «au cours des années précédentes, les ménages ont en effet été amenés à mettre en œuvre des stratégies d’adaptation aux mauvaises récoltes qui ont réduit à la fois leur capacité à produire, mais absorber également leurs revenus au détriment de la reconstitution de cette capacité. Pour l’année 2016, les analyses du cadre harmonisé pour la sécurité alimentaire projettent une nouvelle période de forte insécurité alimentaire au cours de la saison des pluies pour la région de Matam».

Entre autres éléments qui justifient la mise en œuvre de ce projet d’urgence dont la conception est basée dans les déterminants multidimensionnels et interconnectés de la malnutrition. A savoir, la sécurité alimentaire des ménages, les soins prodigués par la mère à l’enfant de mois de 5 ans, l’accès aux services sociaux de base, notamment un environnement sanitaire adéquat, l’eau potable et l’assainissement. Avec une prise en compte aussi des facteurs structurels en rapport avec le contexte socioéconomique caractérisé par un niveau d’éducation faible des populations, les inégalités liées au genre, la production agricole en générale et le développement économique.

PAR PAPE MOCTAR NDIAYE – Sud Quotidien

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