Les failles du modèle démocratique sénégalais selon Le monde

Malgré la nette victoire de Macky Sall à la présidentielle du 24 février, il est prématuré de faire de Dakar une vitrine de la démocratie en Afrique, estime Christophe Châtelot, journaliste au « Monde Afrique ».

Le Conseil constitutionnel du Sénégal a validé, mardi 5 mars, la large victoire de Macky Sall à l’élection présidentielle du 24 février. Ce n’est pas une surprise. Cela confirme les résultats annoncés précédemment par la Commission nationale de recensement des votes (CNRV). Ce succès électoral est intervenu à l’issue d’un vote jugé « transparent, crédible et paisible » par les observateurs. Le pays démontre à nouveau sa capacité à organiser des élections.

C’est une bonne nouvelle pour le Sénégal et pour l’Afrique en général, surtout en cette « période de sécheresse démocratique »,comme la qualifie l’historien sénégalais et diplomate onusien expérimenté Abdoulaye Bathily. Alors, le Sénégal, une démocratie exemplaire sur le continent africain ? La conclusion est sans doute un peu rapide, tant le système politique local affiche des imperfections.

Sur un plan comptable, la victoire de Macky Sall est incontestable. Le président sortant – élu pour un nouveau mandat ramené de sept à cinq ans depuis la modification constitutionnelle de 2016 – a en effet obtenu 58,27 % des suffrages exprimés. Grâce à un bilan respectable et une campagne de terrain innovante, proche des gens, Macky Sall a ainsi atteint son objectif, ce fameux « coup KO » évitant un second tour aventureux face à un front uni contre lui.
Son score est d’autant plus remarquable que les électeurs se sont fortement mobilisés – 66,23 % de participation, soit douze points de plus qu’en 2012 –, malgré l’appel au boycott d’un ancien président vieillissant et revanchard, Abdoulaye Wade. Macky Sall distance Idrissa Seck (20,51 %), ancien premier ministre, que l’on disait politiquement moribond. Le député antisystème Ousmane Sonko affiche un score inattendu (15,67 %) pour un nouveau venu sur la scène sénégalaise, mais, au niveau national, la coalition présidentielle Benno Bokk Yakaar (BBY) l’emporte dans douze des quatorze régions.

Tentations autoritaires

Dans un communiqué commun, les perdants ont toutefois rejeté « fermement et sans aucune réserve ces résultats ». Pourtant, ils ont renoncé à déposer des recours devant le Conseil constitutionnel. Pourquoi se priver de cette arme légale si « la confiscation » du vote est si évidente ? Sans doute parce que les preuves manquaient. D’ailleurs, leurs partisans n’ont pas pris les rues d’assaut comme ils l’auraient probablement fait, si l’opposition avait été outrageusement volée.

    Le monde

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.