L’émouvante lettre posthume de Bineta Camara : Moi Bineta !

Ce 18 mai 2019 a sonné la fin d’une vie faite de rêve et d’espoir. Je venais d’avoir seulement 23 ans, le 14 mai. Dans ma dernière demeure, je vous écris ces mots pour un dernier adieu.

Hier nuit j’ai pleuré. Comme un enfant, j’ai pleuré. De toutes mes forces, j’ai crié et pleuré. J’ai pleuré parce que plus jamais je ne vous reverrai chèr(es) amis. J’ai pleuré parce qu’un sanguinaire a débarqué chez moi, hier vers les coups de 21h, alors que j’étais seule à la maison, abandonnée à moi même, sans défense ni aide.Meurtre de Bineta Camara

J’ai pleuré car je savais que les rêves et espoirs que j’avais nourris allé tomber à l’eau. J’ai pleuré parce que toute cette ambition que j’avais de servir ma nation, mais aussi et surtout ma région Tambacounda allait être anéantie. Tambacounda, cette région qui m’a vue grandir vocifère «justice pour Bineta» car aucune consolation ne saurait être à la hauteur.

De l’école primaire St Joseph au lycée Mame Cheikh Mbaye en passant par le collège Thierno Souleymane Agne, je me suis toujours efforcée à faire la fierté de mes parents et professeurs. D’aucuns se désolent de ma disparition en clamant haut et fort justice.

Je suis ou disons j’étais une jeune sénégalaise, citoyenne comme tous les autres mais malheureusement une fille. Pour un simple besoin de satisfaction d’un instinct de libido mon âme m’a été prise. On a privé à mes parents de leurs filles, à mes amis leurs amies. Si seulement, je pouvais rouvrir les yeux pour revoir mes anciens camarades, les serrer très fort, leur donner un long bisou et leur dire dire avec le cœur : un dernier je t’aime. Si seulement, j’avais le pouvoir de faire pareil pour tous les membres de ma famille.

Hélas, mon corps reste inerte, je n’ai pas ce pouvoir. On m’a liquidé, je suis parti, mes rêves avec moi. Oui j’avais des rêves comme tout jeune : devenir quelqu’un. Voir mes amis et parents pleurer était mon dernier souhait, aujourd’hui leurs chaudes larmes vont arroser ma tombe. Mes pensées vont à l’endroit de mon papa et de ma maman. Comment va- t-on leur annoncer ma pitoyable agonie ? Comment vont-ils vivre le jour de mes funérailles ? Si vous pensez que c’est normal que je meurs et que mon bourreau continue de vaquer à ses occupations, laissez le délecter le goût de mon sang. Sinon exiger sa condamnation à vie.

Dites à toutes et à tous de ne pas oublier de prier pour moi. Je m’appelle Bineta Camara et je vous dis Adieu !

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