Edito – Ce que dieu pense du pétrole

Si le pétrole suscite autant de polémiques et de guerres (malheureusement) à chaque fois qu’on en découvre, c’est seulement parce qu’aux origines, le pétrole n’est pas une chose qui était destinée à être découverte. Ou, du moins, c’est ce qu’en pense Dieu. Dieu, oui, Dieu lui-même ! Il l’a dit, notre Dieu, qu’il n’a pas créé le pétrole pour que les hommes y accèdent.

Le Seigneur, nous dira-t-on, est Clément et fait sortir de terre toute sorte de richesse (parmi lesquelles le pétrole), pour que les hommes, en les exploitant, trouvent en elles des moyens de rendre la vie plus facile et plus aisée. Il est certes clément et a plus d’une merveille créé pour notre bonheur, mais, le pétrole, lui, n’en fait pas partie. Sommes-nous en train de parler de la fameuse théorie selon laquelle le pétrole serait maudit ? Assurément pas.

Le Seigneur, nous dira-t-on encore, a déjà parlé à l’humanité à travers les livres saints. Tout ce que l’homme a su, tout ce qu’il sait et tout ce qu’il doit savoir ultérieurement est condensé dans ses trois chef-d’œuvre que sont le Zabour, la Bible, les Évangiles, le Coran etc. Seulement, voilà, il y a un dernier livre qui dit que le pétrole n’est pas une création divine mais, plutôt, un accident d’après-création divine.

N’est-il pas hérétique de parler de la sorte ? Peut-être. Raison pour laquelle, d’ailleurs, nous demandons à tout croyant qui lit jusque-là et qui n’a pas d’humour d’arrêter la lecture. Ce qui va suivre, en vrai, est une pièce de théâtre plus que drôle, où Dieu sera…l’acteur principal. Une pièce de théâtre, donc pas un livre saint. Un roman même. Le nom de l’ouvrage en question est : Le C.V. de Dieu. il est écrit en 1995 par Jean-Louis Fournier, et réédité en 2008. C’est précisément ce livre qui dit que Dieu n’a pas créé intentionnellement le pétrole et qu’Il n’a jamais voulu que l’homme le découvre.

Mais, d’abord, donnons un résumé du livre : « Le ciel était fini, la Terre était finie, les animaux étaient finis, l’homme était fini. Dieu pensa qu’il était fini aussi, et sombra dans une profonde mélancolie. Il ne savait à quoi se mettre. Il fit un peu de poterie, pétrit une boule de terre, mais le cœur n’y était plus. Il n’avait plus confiance en lui, il avait perdu la foi. Dieu ne croyait plus en Dieu. Il lui fallait d’urgence de l’activité, de nouveaux projets, des gros chantiers. Il décida alors de chercher du travail, et, comme  tout un chacun, il rédigea un curriculum vitae. »

Le livre fait 209 pages, et on ne s’ennuie pas en le lisant. On ne sent pas aussi les pages s’épuiser. Cependant, sautons jusqu’aux passages qui nous intéressent. Ils sont deux. Comme on pouvait s’y attendre, le directeur de « l’entreprise » où Dieu a déposé son C.V était étonné par la richesse du dossier fourni par Dieu. Il le reçoit en entretien. A un moment du tête-à-tête avec le recruteur, notre Seigneur Dieu le postulant  dit ceci : « j’ai fabriqué une petite série d’êtres vivants et je les ai jetés en l’air, comme on jette du sable pour connaitre la direction du vent. Ceux qui ne sont pas tombés, je les ai appelé oiseaux ; ceux qui sont retombés dans l’eau et ne se sont pas noyés, poissons ; et ceux qui sont tombés sur la terre à quatre pattes, vaches… Il n’y a qu’un qui est retombé sur ses deux pieds… (A ce moment de la narration, l’auteur interrompt Dieu et plaça cette phrase : « Dieu s’est arrêté, il semble ému…avant de redonner la parole à Dieu qui dit à propos de l’homme ce qui suit…). Il a commencé à se plaindre et à m’engueuler… » (Page 63)

En effet, Jean-Louis Fournier, présente un dieu triste. A la page 73, il se demande si c’était la peine de doter les hommes de pieds, puisqu’ « ils se sont mis des roues, les imbéciles… Ils traversent tout à cent à l’heure, sans prendre le temps de regarder » toutes les merveilles qui longent les routes.

Le fait alors que les hommes roulent en voiture, abandonnant ainsi la marche, niant de fait l’utilité des pieds que Dieu a pris le temps de créer, attriste (si l’on peut parler ainsi) ce dernier. Et, c’est ce passage qui donne tout son sens à la question du directeur qui, à la page 87, fait au demandeur de travail cette remarque : « Si vous ne voulez pas de l’automobile, il ne fallait pas leur donner le pétrole ! »

Et là, la réponse de Dieu est des plus drôles. Et là, Dieu nous montre que le pétrole n’est qu’un accident de la création. Le Seigneur dira : « qu’est-ce que vous racontez là ! Je ne leur ai pas donné, ils l’ont trouvé malgré moi. Réfléchissez une seconde : si j’avais voulu qu’ils le trouvent, je ne me serais pas fatigué à l’enterrer dans des trous de plusieurs kilomètres de profondeur ; je leur aurais fait des sources. »

Après cette première réponse de Dieu, le directeur lui relance : « mais alors, d’où il vient, ce pétrole. » Et, à Dieu de fournir la réponse à laquelle nul comique, même le plus drôle, n’a pensé. Ecoutons-le : « quand j’ai eu fini le monde, vous imaginez bien qu’il a fallu nettoyer, parce que lorsque je travaille j’en mets partout. Alors j’ai nettoyé par terre, et j’ai rincé ma serpillière. Mais l’eau sale, fallait bien la mettre quelque part, alors j’ai fait des trous dans la terre. Des égouts en quelque sorte (…) et j’ai vidé mes eaux sales dedans. Je ne pouvais pas imaginer que l’Homo Sapiens allait pomper cette eau un jour, pour empoisonner la Terre, dégueulasser la mer et faire chier les mouettes .»

Ça, ce n’est surement pas le Dieu des livres saints. « Le C.V de Dieu » présente un Seigneur  à la fois « open » et « hardcore.» Mais, le directeur ne l’a pas recruté, à cause de sa position sur l’économie. Cette dernière n’a pour Lui aucun intérêt. Normal, qu’on ne l’ait pas retenu, d’ailleurs, parce qu’une entreprise, ça roule avec et pour l’argent, donc, avec et pour l’économie.

Quoi qu’il en soit, Dieu a dit ce qu’il a dit : le pétrole, c’est de l’eau sale. Une eau de nettoyage, qu’il a jugé nécessaire de placer au plus profond de la terre, une eau impropre à la consommation. Alors, qu’on ne s’étonne pas, lorsque les hommes deviennent saouls en la consommant. Saouls, jusqu’à allumer des foyers de tension pour certains, pour d’autres, saouls jusqu’à faire le show auquel on assiste aujourd’hui au Sénégal. De toute façon, le Dieu de Jean-Louis Fournier nous aura prévenus.

 

 

                         Moussa Seck – laviesenegalaise.com

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