DOSSIER: Recrudescence de la violence physique et verbale, le pays de la Teranga est-il en passe de devenir un «royaume du sang»?

Depuis quelques mois, les sénégalais sont mortifiés par l’annonce de scandales d’une violence inouïe. Notre pays est devenu méconnaissable suite à des meurtres et assassinats d’une envergure sans précédentes. Quelle sont les causes probables de cette transformation subite des mœurs ? Quelle est la responsabilité de l’état et des populations face à ce fléau ? Quelles mesures coercitives et réalistes devraient être prises pour éradiquer ce mal ?y-en-a-marre

Un Taximan tué par balle après une dispute qui pouvait être évitée, les deux agents de la pharmacie égorgés et dépouillés à Ndioum, la 5e vice-présidente du Conseil Economique Social et Environnemental (Fatoumata Mactar Ndiaye) assassinée dans sa propre demeure, un jeune poignardé par son ami à Grand Yoff pour une histoire de pièce de monnaie…. Et cette liste n’est pas exhaustive. La presse ne relate pas en effet les multitudes de cas de violences qui se déroulent fréquemment dans les marchés, les places publiques, les garages, les autobus etc, et qui débouchent sur des blessures laissant des séquelles chroniques.

Les origines de ce mal sont souvent plus profondes que celles indiquées par des citoyens sous l’effet de la colère. Les mesures envisagées également par les autorités sont la plupart du temps inefficaces et inadaptées. Comme dit l’adage : « Il faut toujours attaquer le mal à la racine ».

Les Causes probables

Cette transformation sociale dans un pays qui jadis avait la réputation d’être un havre de paix doit faire réfléchir les élites.  La cause originelle de cette dépravation des mœurs est sans nul doute la pauvreté grandissante des populations. Malgré les chiffres annoncés par nos autorités pour justifier la hausse du pouvoir d’achat du sénégalais lambda depuis 2012, le constat est tout autre. Il suffit de parcourir les rues de Dakar ou bien de visiter les coins reculés du monde rural pour se rendre compte du degré de pauvreté aigue dans lequel se trouvent les ménages. Ainsi, les « armées de jeunes chômeurs » se voient obligés d’employer la violence pour subvenir à leur besoins et à ceux de leurs familles respectives.

La Responsabilité de l’Etat

Cependant, les responsabilités sont partagées entre l’Etat et les familles de ces fauteurs de troubles.  Quoi que l’on dise, la vision de l’administration en place en matière de sécurité et de justice doit être diagnostiquée et réformée. La corruption a fini de gagner plusieurs d’entre nous et cela dans tous les secteurs et dans tous les domaines. Il est inconcevable de constater que l’Etat est capable de déployer des moyens pharaoniques pour réprimander ou interdire des marches de l’opposition, alors que les populations sont tout le temps agressées, violées, volées ou tuées sans la présence d’une force de l’ordre à proximité qui pourrait les protéger. Certains quartiers ont d’ailleurs pris leurs propres initiatives en recrutant des groupes de jeunes qui patrouillent dans certaines contrées afin de renforcer la sécurité de leur circonscription. Il est donc inquiétant et honteux de voir que cette responsabilité régalienne qui était dévolue à l’état, a autant perdu sa notoriété.

La Responsabilité des familles

Les familles démunies n’ont plus les moyens d’assurer la prise en charge sanitaire et sociale de leurs membres. La conséquence qui en découle est une désorientation des jeunes, un manque de repère et de référence ainsi que l’emploi de moyens peu catholiques pour subvenir à ses besoins.

Les mesures à envisager

La première mesure réaliste que l’Etat devrait prendre serait de mobiliser son gouvernement à travailler davantage dans la réduction du taux de chômage. Quoi que l’on fasse, la violence sera toujours l’un des derniers recours des sans-emplois pour survivre. Ensuite, le système de sécurité, surtout de proximité doit être renforcé et réformé en octroyant aux forces de l’ordre des moyens qui seront à la hauteur de leurs missions. La police est sous équipée et les agents sont mal payés. Quelle personne risquerait sa vie à protéger ses sujets sans une assurance certaine de sa vie et celle de sa famille ?

D’autre part, l’application ou pas de la peine de mort nous interpelle tous. La question n’est pas là en réalité. Le Sénégal est une République laïque et l’Etat ne prendra jamais le risque d’affronter les organismes de droit de l’Homme en restaurant la peine de mort. La seule solution qui vaille serait d’opérer des mesures économiques aptes à réduire drastiquement le taux de chômage. La principale cause de l’insécurité qui règne dans notre pays n’est que la résultante d’un taux de chômage élevé et d’une inertie des autorités étatiques dans l’activation des initiatives individuelles.

« On ne tue pas un être sensible comme on briserait un objet. Il existe parmi les hommes des barbares qui aiment verser le sang, des brutes qui assouvissent sur les bêtes un besoin de tuer. On ne peut plus l’autoriser. De tels actes relèvent du crime. » Le Règne du vivant ( 2014 ) de Cécile Gavriloff, dite Alice Ferney.

Khadime Mbacké Diop – laviesenegalaise.com

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